Discussion

Volley-Collège-N1-Frederic SEVIN

De Conservatoire EPS


Fréderic SEVIN - Collège Manet - Marseille-14ème - Année 2009


Pourquoi proposes-tu ces trois formes de pratique ? et pourquoi chacune d’elles ?

  • Il s’agit d’une progressivité dans l’approche de l’activité marquée par une évolution du système de contraintes. Chacune des formes de pratique dans leur approche permet de répondre à des problèmes rencontrés par les élèves à un moment donné et ainsi leur permettre de pouvoir les dépasser.
  • La 1ère forme de pratique (réduction de la contrainte temporelle et affective par le blocage de la 1ère touche) va inciter les élèves à travailler sur le déplacement et le placement pour intervenir sur le ballon. Elle va leur offrir du temps pour s’organiser individuellement et collectivement en prenant en compte le partenaire.
  • La seconde est l’évolution logique de la pratique. Dès lors que les problèmes affectifs semblent dépassés et que la motricité dans les déplacements et au niveau de l’intervention sur le ballon est en partie résolue, il semble pertinent de remettre en situation la contrainte temporelle. La possibilité de bloquer la seconde touche oriente la crise de temps sur la première intervention.
  • La troisième forme sans blocage peut représenter l’aboutissement de la pratique. Lors d’un premier cycle, il paraît raisonnable de rester sur les 2 premières formes de pratique tant les contenus à aborder sont importants.


On perçoit une progressivité entre les trois propositions, sur quels arguments est-ce que tu la fondes ?

  • L’activité volley-ball est une activité très complexe car elle impose une multitude d’informations (par rapport ballon, partenaire, terrain et soi-même) concentrées dans un laps de temps très court (crise de temps liée au jeu de volée sans rebond où l’erreur est peu tolérée)
  • La pression temporelle semble un frein à un apprentissage efficace. La limiter va permettre à l’élève de se concentrer sur des contenus fondamentaux.
  • On peut permettre aux élèves de traiter pertinemment une bonne partie de ces informations en jonglant avec cette contrainte temporelle. Progressivement, ils vont intégrer les évolutions et la complexité qu’offre l’activité.
  • Ainsi, bloquer la 1ère touche va favoriser l’intégration des principes fondateurs du jeu en 2 touches de balle (qualité de transmission, orientation partagée, dynamique d’action)
  • Le blocage de la 2ème touche va aborder la circulation en 3 touches de balles et les principes fondamentaux qui en découlent (qualité de la 1ère intervention, trajectoire haute et en avant, soutien du partenaire.)


Quelle est la fonction de chacune des variables ?

  • La première proposition (blocage de la 1ère touche) va permettre une entrée dans l’activité de tous les élèves en misant sur le facteur temporel facilitant (Je donne à l’élève du temps pour s’organiser individuellement ET collectivement) mais aussi affectif (blocage d’un ballon pouvant arriver vite et fort).
  • La 2ème forme de pratique a pour fonction de se détacher du blocage en restaurant la pression temporelle sur la première intervention. Toutefois, le blocage possible sur la deuxième touche va orienter les élèves sur les réponses collectives ou individuelles (Orientation partagée, placement, organisation à 2, trajectoire de la balle efférente, type de frappe)


Quels sont tes indicateurs pour passer de l’une à l’autre des formes de pratique ?( indicateur = ce que savent faire les élèves avec suffisamment de stabilité)

  • En Volley, les problèmes que rencontrent les élèves sont de divers ordres : On peut pointer des difficultés majeures dans les déplacements et le placement par rapport aux trajectoires de ballon (prise d’information) pour pouvoir intervenir efficacement : « Je suis prêt à intervenir pour attraper le ballon ; je me déplace pour intervenir face au ballon ; j’ajuste mes déplacements pour me placer efficacement, je fais des passes hautes et en cloche.»
  • Une fois que l’élève a construit une certaine stabilité et efficacité au niveau de ces compétences spécifiques en acceptant le blocage de ballon, il est envisageable de passer à l’étape suivante consistant à supprimer le blocage de la première touche.
  • Cela se caractérise bien souvent par une neutralisation du rapport de force avec des élèves qui se déplacent efficacement dans tout l’espace à défendre. Les échanges commencent à durer, les attitudes sont dynamiques et l’orientation partagée est assimilée.

En quoi est-ce qu’il y a apprentissage ? et qu’est-ce que les élèves apprennent ?

  • Il y a une facilitation des apprentissages et surtout une accessibilité des apprentissages pour tous les élèves. Car en volley, dans une pratique plus courante, les élèves habiles progresseront toujours et répondront aux prescriptions des textes…et les autres ?
  • L’idée est de faciliter l’entrée dans la pratique par la possibilité de blocage pour s’en détacher une fois que les élèves auront intégré certaines conditions d’efficacité telles que le placement par rapport au ballon, l’orientation partagée, l’efficacité dans l’intervention en passe haute…
  • De plus, le règlement mis en place encourage le projet de jeu collectif par la prise en compte du partenaire. La coopération prend tout son sens et le partenaire (placé en situation de réussite) fait partie intégrante du système de jeu.
  • Cela donne l’impression qu’il suffit de pratiquer comme ça pour réussir. Est-ce que les élèves apprennent ? est-ce que c’est ça enseigner ?
  • L’évolution des contraintes permet de mettre les élèves en condition de réussite. Je dirais plutôt que les conditions à la réussite pour tous vont permettre aux élèves de progresser dans leur pratique.
  • Enseigner, c’est permettre à l’élève de se mettre en activité tout en acquérant des éléments favorisant son apprentissage. Le temps de pratique est maximum. Chaque séance va intégrer une contrainte ou un aménagement nouveau (par exemple une zone du fond, bonification si point marqué en progression en 2 touches sans blocage, service…). Les élèves devront s’employer à trouver les réponses pour dépasser ces contraintes, par le tâtonnement, par la confrontation aux autres équipes, par l’observation…


Les élèves semblent à la fois appliqués et motivés : comment tu l’expliques ?

  • Les élèves éprouvent un sentiment de réussite, de compétence. Ils entrent dans l’activité car la forme de pratique enlève dans un premier temps les problèmes affectifs par rapport à l’intervention sur le ballon. De plus, la nécessité de coopération (« Lorsque je bloque, je suis dans l’obligation de faire une passe haute à mon partenaire qui renvoie sans bloquer ») investit davantage les élèves dans un projet collectif.
  • Le sentiment d’échec que l’on trouve souvent en début de cycle en volley laisse place à une vision plus motivante puisque l’aménagement intègre tous les élèves et les met en situation de réussite.
  • Il y a moins de ballons perdus, de temps morts, les échanges sont plus nombreux : il y a du jeu et les élèves jouent sans que l’activité ne se résume qu’à une confrontation au niveau de la mise en jeu ou à du renvoi direct.
  • De plus, l’adaptation du règlement peut s’adapter en fonction des niveaux de chacun.


Tu dénatures l’activité ! oui ? non ? quels sont tes arguments 

  • La forme de pratique peut sembler dénaturer l’activité sociale de référence et choquer les représentations de certains collègues. Ce sont ces représentations qui présentent un frein. Du côté de l’élève, cette prégnance culturelle est moindre et ne pose pas problème puisque la forme de pratique offre l’alternative « je peux bloquer ou ne pas bloquer ».
  • Le blocage va permettre l’accès à l’activité à TOUS les élèves pour ensuite s’en détacher lorsque les situations de jeu s’y prêteront. L’alternative est toujours proposée aux élèves. A eux de s’en servir à bon escient.


Est-ce que cette variable de blocage ne revient pas à séquentialiser les opérations technico-tactiques (pour les rendre accessibles aux élèves), un peu à la manière du gagne-terrain par zone conquise comme en flag-rugby ?

  • Tout à fait. Il s’agit de supprimer une contrainte pour se focaliser sur d’autres problèmes essentiels. Une fois ces problèmes dépassés, on réinjecte progressivement la contrainte temporelle.
  • Si tu devais dire à quel problème professionnel tu réponds, tu le formulerais comment ?
  • Pour une activité complexe pour les élèves, mais aussi pour les enseignants qui la perçoivent comme complexe au regard des réponses de leurs élèves, il s’agit d’aménager des variables didactiques par une forme de pratique adaptée permettant à chacun (prof et élèves) de dépasser le sentiment d’échec.


Et si tu devais désigner le savoir professionnel que tu mobilises, tu le dirais comment ?

  • Savoir adapter une APS telle que le volley aux capacités des élèves pour la rendre plus accessible tout en donnant du sens à l’activité déployée par ces derniers.